Mort d'un silence de Clémence Boulouque

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Et voilà mon dernier livre du challenge ! Pour trouver celui que j'allais lire, j'ai cherché dans mon carnet tous les livres que j'avais notés et que je voulais lire. Ensuite, j'ai cherché ceux qui étaient à la médiathèque. Et c'est ainsi que j'ai choisi "Mort d'un silence" de Clémence Boulouque. De cette auteure, j'avais noté deux autres livres : "Je n'emporte rien du monde" et "Sujets libres". Parmi les dix auteurs que j'avais dans ma liste, les trois qui étaient à la médiathèque s'adressaient à un membre de leur famille : "La cache" de Christophe Boltanski et "Noire Claire" de Christian Bobin.

 

Quatrième de couverture : "Je suis la fille du juge Boulouque, du terrorisme, des années quatre-vingt, des attentats parisiens. Et je suis orpheline de tout cela. Personne ne se souvient de mon père et la vague d'attentats des années quatre-vingt à Paris se confond avec celles qui ont suivi - c'est après tout le destin des vagues de se retirer. C'était aussi le sien. Je suis la petite fille qui a connu les menaces de mort et les gardes du corps autour de sa dixième année - les campagnes de presse, les phrases assassines. J'avais treize ans lorsque mon père a tiré, le 13 décembre 1990. Tiré sur lui, cette nuit-là. Et sur nos vies."

Et j'ai envie de raconter la suite de cet extrait : "J'avais treize ans. Bientôt, à vingt-six ans, onze mois et six jours, j'aurai passé plus de la moitié de la vie sans lui. Au début, j'ai compté les minutes qui me séparaient de sa mort, puis les heures, les jours. Parfois, je me surprends à calculer encore son absence en mois quand, déjà, les années sont si nombreuses à s'être glissées entre nous. Je change sans cesse l'unité de mesure de cette distance. J'arpente les dimensions de l'absence. Cette nuit-là, il a cessé de vieillir. Dans quinze ans, quatre mois et dix jours, je serai son aînée, sa grande soeur. Puis sa mère. Je me rapproche de lui à mesure que je m'en éloigne."

J'ai adoré ce livre et l'ai lu en cinq soirs (c'est vrai il ne fait qu'une centaine de pages!). Et je l'ai terminé en larmes !

En septembre 2001, Clémence Boulouque est à New York et suite aux attentats, elle écrit ce livre, elle dont le père s'est suicidé en 1990, le juge anti-terroriste lors des attentats en France en 1986. "Etre rattrapée par le terrorisme là où je voulais me construire une nouvelle vie." "Je ne suis qu'une orpheline avec son histoire. Des souvenirs qui ne servent à rien... En écrivant, j'ai retrouvée une mémoire que j'avais condamnée... Alors je barre,je raye... Peut-être est-ce finalement ma façon de m'anéantir, moi aussi, par instant. Je me détruis sans me tuer."

En lisant ce livre, j'ai moi aussi retrouvé des souvenirs : vaguement le suicide du juge Boulouque en 1990 qui avait, en 1987, relâché le diplomate iranien Gordji, mais surtout les journalistes retenus en otage au Liban par le Hezbollah. Par contre, je ne me souvenais pas que tout était lié : "Nous savions depuis le début de la soirée que le diplomate iranien était sorti libre du bureau du juge. Les journalistes avaient ajouté qu'il était loisible de s'interroger sur la corrélation entre ce rapide interrogatoire et le sort des otages français encore retenu au Liban par des mouvements islamistes pro-iraniens. Si Gordji était une monnaie d'échange, le juge devenait un pantin." Et je ne me souvenais pas non plus que cette histoire avait été reprise par François Mitterrand à l'encontre de Jacques Chirac lors du débat des Présidentielles de 1988.

Clémence Boulouque n'emploie jamais le mot suicide pour son père : le titre de son livre : mort d'un silence", "mais j'ai sentie que j'étais blottie dans du vide. Il s'était déjà absenté."

Autres extraits : "Sans lui, j'avais tout perdu. Lui. Mes gardes du corps. Les yeux rieurs de ma mère. J'avais même perdu des mots. "Parents." "Papa." Je ne les prononcerais plus. La nuit, je répétais ces deux syllabes à voix basse, pa-pa, continuellement, jusqu'à m'endormir. C'était devenu le mot le plus long de la terre. Il écrasait "anticonstitutionnellement", et de loin. Le jour, je sentais les larmes monter lorsque j'entendais dans la rue un petit enfant chanceux appeler son père."

"Il est parti, m'a laissée seule avec ma vie à construire et trop - ou trop peu - de la sienne, détruite. Ceux qui l'ont côtoyé m'ont livré des anecdotes que je tente d'assembler - la vie des morts est un collage."

Un jour, un avocat lui dit : "Vous voyez tous ces dossiers ? Tout ça, ce sont mes gosses que je n'ai pas vus grandir."

Clémence Boulouque est un beau sujet pour une psychologue, n'est-ce pas ? D'ailleurs, lorsqu'elle écrit dix ans après "Je n'emporte rien du monde", c'est en souvenir du suicide d'une de ses amies de lycée lorsqu'elle était ado.

 

 

 

 

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Commenter cet article
1
T'es la 1ère a avoir fini le challenge je crois
Répondre
L
Oui la 1ère ! Bravo !!!<br /> En même temps, ce n'est pas une course, et heureusement car je finirais certainement bonne dernière... !